Le crash de l’hélicoptère du président Iranien Raïssi est-il le fruit de cette géopolitique qui n’en finit plus de se tendre au Moyen-Orient ? Toutes les hypothèses, y compris les plus farfelues, alimentent les réseaux sociaux allant ainsi du simple accident d’un hélicoptère devenu vétuste par mauvais temps, aux implications de la CIA américaine ou de l’opposition Iranienne en passant par des acteurs de la mouvance shiite ou de son propre clan alors que la succession de Khamenei s’organisait…
Les conséquences des embargos économiques
En tout cas, les embargos successifs depuis 1979 décrétés par les Etats-Unis et leurs alliés contre l’Iran auront eu pour conséquence d’obliger des membres dirigeants d’un pays influent comme l’Iran à voler sur un vieil appareil entretenu par des pièces de rechange non homologuées.
Certes les mauvaises conditions météorologiques de ce jour-là contribuent à augmenter le risque qu’un appareil américain (de surcroit) mal entretenu finisse mal.
Cependant, si la piste de l’accident semble privilégiée, ce cas illustre bien les conséquences concrètes que des embargos économiques peuvent générer sur des sociétés ou des pays.
Nos pays occidentaux utilisent de plus en plus cette « arme » de dissuasion dans leurs stratégies de pression géopolitique dans le but d’éviter d’intervenir militairement, ou de compléter des interventions militaires.
La question lancinante qui revient souvent est justement de savoir si ces embargos demeurent bien des stratégies efficaces face à des sociétés ou des régimes sur lesquels nos pays souhaitent mettre une pression importante. Actuellement, l’Iran, tout comme la Russie, font face à des embargos très stricts. Dans une moindre mesure la Chine doit également faire face à des restrictions, notamment de la part des USA pour ce qui concerne les semi-conducteurs ayant la plus grande avancée technologique (pour simplifier).
Les formes de boycott
Tout le monde a en tête les boycotts infligés à l’Iran, la Syrie, la Russie ou même la Chine.
Ceux-ci peuvent prendre différentes formes comme des interdictions complètes de liens économiques avec un pays ou une entreprise. Les transactions utilisant les dollars américains sont interdites pour toutes les sociétés du monde qui souhaiteraient commercer avec l’Iran ; la BNP en a fait les frais avec une amende exceptionnelle de 8.9 milliards d’USD en 2014.
Le cas de la Chine nous rappelle qu’ils peuvent également prendre d’autres formes et rester partiels en s’appliquant uniquement à des secteurs ou des sociétés : Huawei ou encore certains semi-conducteurs. En retour, la Chine souhaite mettre des taxes rédhibitoires sur le cognac français.
Ces boycotts prennent alors plusieurs types de formes allant des interdictions de commerce complètes ou partielles, mais aussi des taxes élevées ou des normes (techniques, administratives…) drastiques rendant les échanges compliqués.
Répercussions économiques
Les premières conséquences de ces embargos sont d’abord d’ordre économique.
Ils engendrent des pertes de revenus pour les entités les subissant. De manière générale, en ayant moins, ou pas, de produits à vendre, la diminution de la consommation ne trouve pas toujours de produits de substitution et engendre ainsi une baisse de chiffre d’affaires pour les sociétés, ou de revenus pour les états.
Mais ces boycotts entrainent bien souvent des pertes de part de marché au profit des concurrents non soumis aux mêmes règles.
Autre conséquence économique majeure : l’inflation. Le boycott du gaz russe en 2022 illustre facilement ce point. La baisse de l’offre augmente mécaniquement si le niveau de la demande ne s’ajuste pas, et ce, jusqu’à ce que des « relais » soient mis en place.
Cas extrêmes : au-delà des pertes de pouvoir d’achat manifestes, les impacts économiques peuvent aller jusqu’à des fermetures d’entreprise et des hausses du chômage. Des effets d’entrainement peuvent se faire avec, en cascade, des situations qui affectent fournisseurs et sous-traitants dans un effet domino désastreux pour les économies locales.
Certaines sociétés, sous la pression de ses consommateurs, changent ainsi leur comportement. Nestlé dans les années 1970 faisait alors les frais de pratiques peu éthiques pour ces produits pour bébé et changeaient ses techniques de commercialisations. Nike dans les années 2005 également doit faire face à une campagne de boycott de la part de ses clients qui dénoncent l’exploitation d’enfants pour la confection de ses chaussures.
Répercussion politiques
Les difficultés économiques engendrées par des embargos entrainent bien souvent des répercussions politiques. Le but affiché de ces sanctions économiques vise bien, la plupart du temps, à modifier le comportement des dirigeants de ces pays ou entreprises avec qui le conflit existe.
Celles-ci demeurent cependant extrêmement difficiles à anticiper et ne sont pas toujours celles escomptées par ceux qui les mettent en place. Elles peuvent servir de catalyseur à un pouvoir en place pour stigmatiser un adversaire ou un ennemi et renforcer ainsi son pouvoir ; une situation que beaucoup d’observateurs semblent rapporter de Russie avec le président Poutine paraissant soutenu par une majorité, certes amputées de ceux qui ont fui le pays, mais toujours plébiscité par ses compatriotes après deux ans.
Un embargo peut évidemment accroitre le sentiment de défiance qu’une population ressent vis-à-vis de ses dirigeants et provoquer les effets escomptés. L’Afrique du Sud de l’apartheid, après de nombreuses années – plus de 4 ans – de mise au ban des nations finira par changer de régime pour faire face à une crise économique doublée d’une contestation nationale exacerbée par les difficultés de vie de ses citoyens.
En tout état de cause, les répercussions de ces boycotts restent très difficiles à mesurer. Quel serait l’état de l’économie de la Russie si le boycott actuel n’avait pas lieu ? L’Afrique du Sud aurait-elle finit par changer ses politiques discriminatoires si la pression internationale n’avait pas eu lieu ?
Dans le cas de sanctions économiques importantes, les populations les plus faibles finissent toujours par payer le prix le plus fort. L’Iran reste un triste exemple même s’il semble que son dirigeant, malgré toutes les théories avancées, en a fait les frais.
Les effets de ces embargos, au-delà des tensions économiques et politiques, ne se jugent que dans la durée. La patience et la ténacité peuvent conduire aux réformes souhaitées.